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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/539

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l’avais écrite d’abord au comte Bertrand ; il offrait de plus d’y joindre copie de toute ma correspondance, chose qu’il m’avait constamment refusée jusque-là ; mais plus il faisait de concessions, plus je devais tenir bon. « Il n’est plus temps, lui répondis-je avec une espèce de solennité, le sort en est jeté, j’ai prononcé moi-même mon jugement, ma propre sentence. Je n’écrirai pas à Longwood, et je vous demande, pour la centième fois, de vouloir bien m’éloigner à l’instant. – Mais du moins voudriez-vous bien écrire à Longwood mes offres et votre refus ? – Oui, je le ferai. » Et il partit extrêmement déconcerté, nous faisant entendre, pour dernière tentative, que nous ne pourrions faire voile que sur un transport ; qu’il ne pouvait dire quand, et qu’il n’y avait point de médecin à bord, ce qui serait un bien grand inconvénient à l’état de mon fils, etc., etc.


Départ de Balcombe’s cottage ; translation à la ville.


Mardi 24.

Mon fils a été extrêmement malade dans la nuit, j’étais moi-même fort souffrant. Au point du jour, j’ai envoyé auprès des docteurs Baxter et O’Méara, pour réclamer leur immédiate assistance ; et dans mon désespoir, poussé à bout, j’ai écrit à sir Hudson Lowe qu’il nous était impossible de supporter plus longtemps le traitement sous lequel nous succombions mon fils et moi, que malgré l’état dangereux de mon fils, il y avait plus de sept jours que nous n’avions vu les médecins ; que nous étions tellement hors de la route, que toute leur bienveillance ne pouvait l’emporter sur la difficulté de nous donner leurs soins, que je réclamais donc qu’il voulût bien nous tirer de notre isolement, sans le moindre délai ; que je lui demandais d’être transporté à la ville, fût-ce à la geôle publique, s’il le jugeait nécessaire. Pour cette fois, ma lettre eut son effet immédiat : je reçus, par le retour de l’ordonnance, un billet du gouverneur, m’annonçant que le jour même il me ferait conduire dans sa propre demeure, à la ville. En effet, vers le soir un officier est venu nous prendre. Combien, au moment du départ, Longwood a fixé nos regards ! combien, tout le long de la route, il a occupé mes pensées, remué mes sentiments ! Ce que j’ai éprouvé, lorsque, arrêté pour le considérer une dernière fois, il m’a fallu le voir disparaître en me remettant en route, mon cœur seul le connaît !…


Séjour au château du gouvernement, meilleurs procédés, détails, etc., etc..


Du mercredi 25 au samedi 28.

Nous nous sommes trouvés établis dans la demeure du gouverneur,