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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/711

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médecin de Napoléon, que j’étais simplement autorisé à lui offrir des soins. Je lui ai répliqué que les lettres de change que je tirais pour mon payement, sur le conseil de marine, dans la forme prescrite par sir Georges Cockburn me conféraient le titre de chirurgien de Napoléon et de sa suite. Je lui demandai alors quelle était, selon lui, ma fonction à Sainte-Hélène.

« Vous croyez-vous donc indépendant de moi ? — Vous connaissez, répondis-je, mieux que moi la limite de vos pouvoirs. » À ces mots, le gouverneur exaspéré se croisa les bras, me regarda avec fureur et me dit : « C’est là mon bureau, monsieur, et voilà la porte pour entrer. Quand je vous enverrai chercher pour affaire de service, vous vous arrêterez à cette porte, et ne mettrez pas le pied plus avant dans l’appartement. »

Ma réponse fut que je n’étais jamais venu chez lui pour mon plaisir. Je me retirai.

6. — Je suis questionné de nouveau par le gouverneur. Je persiste dans mes refus, il s’exaspère davantage.

7. — Sir Hudson Lowe m’a fait demander : j’y suis allé. Je lui ai dit en réponse à ses questions que la santé du prisonnier n’était pas aussi bonne que lors de mon premier rapport. « Le général Bonaparte, m’a-t-il dit, pense obtenir en s’enfermant dans sa chambre quelque relâchement dans les restrictions ; dites-lui qu’il se trompe : les choses resteront les mêmes, quand même sa santé serait plus mauvaise. »

9. — J’ai été mandé encore chez le gouverneur. Nouvelles questions hautaines, insistantes et viles. Le gouverneur suppose que j’exerce une grande influence sur Napoléon. J’ai souri et lui ai dit qu’il connaissait bien peu le caractère du prisonnier.

13. — Suite des interrogatoires à Plantation-House. J’ai dit au gouverneur que l’indisposition de l’Empereur devenait de plus en plus sérieuse.

14. — Quelques remèdes ont affaibli le malaise.

M. O’Méara ajoute ici :

Le duc de Rovigo et des officiers français m’ont parlé souvent de l’humanité de Napoléon à la guerre. Quand une affaire était terminée, il visitait aussitôt le champ de bataille avec une partie de l’état-major et des gens de sa maison portant des bouillons, du vin. On a vu ce grand, cet excellent homme passer plusieurs heures à remplir ces devoirs sacrés. Voilà pourquoi, indépendamment de son génie, les soldats l’adoraient !

Le duc de Rovigo m’a raconté qu’à l’une des journées de la bataille de Wagram, l’Empereur, suivi de ses officiers et de ses serviteurs, visita