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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/793

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qu’il est saisi d’un engourdissement général qui ne se dissipe que par l’approche du feu.

4 octobre. — L’Empereur rentre extrêmement fatigué ; il se met au lit, et demande qu’on le laisse en repos. Il a fait, partie à cheval, partie en calèche, une course de deux lieues et demie ; s’est reposé à Sandy-Bay-Raidge ; il est descendu chez M. Deveton, où il a déjeuné, et bu, m’a-t-il dit, trois verres de champagne. Il éprouve un violent mal de tête.

5. — L’Empereur continue à se plaindre du mal de tête ; la douleur au foie est beaucoup augmentée et s’étend jusqu’à l’épaule droite.

6, 7, 8, 9. — Le mauvais temps empêche l’Empereur de sortir en calèche. Il se promène au jardin, persiste à rester deux heures dans un bain chauffé à une température élevée. Sur mes objections, il répond que cet usage est suivi en Égypte, qu’il en a retiré les meilleurs effets. « Vos confrères ne m’épargnaient pas les remontrances. J’allais gagner la…… Que sais-je ! les maladies que je devais avoir. Eh bien ! je n’en eus point, je me portai à merveille. Mon instinct me servit mieux que la science d’Hippocrate. Ma brosse et ma flanelle se trouvèrent plus entendues que tous ses suppôts. Ceci n’est pas pour vous, docteur ; je suis plein de confiance en vos lumières ; mais j’ai mon expérience par devers moi. »

10. — L’Empereur est resté une heure dans le bain. Il a été obligé d’en sortir pour se mettre au lit ; il était si faible qu’il a éprouvé une espèce d’évanouissement.

11, 12, 13. — La santé de l’Empereur ne s’améliore pas ; les forces, au contraire, semblent aller en décroissant. Il s’est éveillé vers le milieu de la nuit avec une violente douleur de tête, et un froid glacial aux extrémités.

14. — L’Empereur s’est réveillé avec une douleur profonde dans le côté gauche de la tête. Je conseille quelques émollients, et j’insiste sur l’application des vésicatoires. « Docteur ! pas de drogues ; je vous l’ai dit bien des fois, nous sommes une machine à vivre, nous sommes organisés pour cela ; c’est notre nature. N’entrave pas la vie, laissez-la à son aise, qu’elle puisse se défendre. Notre corps est une montre qui doit aller un certain temps, l’horloger n’a pas la faculté de l’ouvrir ; il ne peut la manier qu’à tâtons et les yeux bandés. Pour une fois qu’il l’aide et la soulage, il l’endommage dix, et finit par la détruire. Vous le savez, docteur, l’art de guérir n’est autre que