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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/863

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Parme le lendemain matin. Le major des dragons, le chevalier Rossi, que j’avais connu avant mon départ pour Sainte-Hélène, eut la complaisance deme présenter au comte Neipperg, qui m’accueillit et m’adressa une foule de questions sur la maladie et la mort de l’Empereur. Je désirais donner les mêmes détails à l’impératrice et lui remettre une lettre que lui adressaient les comtes Bertrand et Montholon ; je priai Son Excellence de m’obtenir une audience de Sa Majesté : « Je ne puis, me répondit-il ; la nouvelle de votre arrivée n’a fait qu’accroître la douleur de l’archiduchesse : elle se plaint, elle gémit, elle n’est pas en état de vous recevoir ; mais je vous offre de vous servir d’intermédiaire ; je lui transmettrai ce que vous me confierez de vive voix, et lui présenterai la lettre, si vous ne craignez pas qu’elle passe dans mes mains. » J’étais loin d’avoir de la défiance, et, en eussé-je eu, la bienveillance qu’il me témoignait l’eût bannie. Je lui remis la lettre, il sortit, revint au bout d’un instant : « Sa Majesté en a pris lecture ; elle regrette vivement d’être hors d’état de vous recevoir, mais elle ne le peut. Elle accueille avec transport les dernières volontés de Napoléon à votre égard ; cependant elle a besoin, avant de les exécuter, de les soumettre à son auguste père. Vous les connaissez. — Je les connais. — N’importe, je vais vous en donner lecture.

Londres, 12 septembre 1821.
« Madame,

Le docteur Antommarchi, qui aura l’honneur de remettre cette lettre à Votre Majesté, a soigné l’Empereur, votre auguste époux, durant la maladie à laquelle il a succombé.

« Dans ses derniers moments, l’Empereur nous a chargés de faire connaître à Votre Majesté qu’il la priait de faire payer à M. Antommarchi une pension viagère de six mille francs, en récompense de ses services à Sainte-Hélène, et qu’il désirait qu’elle l’attachât à sa maison comme chirurgien ordinaire, ainsi que M. l’abbé Vignali en qualité d’aumônier, jusqu’à la majorité de son fils, époque à laquelle il désire qu’il lui soit attaché.

« Nous croyons, Madame, remplir un dernier devoir envers l’Empereur, en transmettant à Votre Majesté les dernières volontés qu’il nous a plusieurs fois réitérées.

» Nous avons l’honneur d’être, Madame, de Votre Majesté,

« Les très-humbles et très-obéissants serviteurs,
« Le comte Bertrand, le comte Montholon. »