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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/927

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l’archevêque et tout le clergé. — En face de la tribune royale, un peu au-dessous, les ministres ; — de l’autre côté, messieurs les maréchaux ! et amiraux de France. — Au devant des ministres, le gouverneur de l’Hôtel des Invalides, le vénérable maréchal Moncey, qui s’était fait rouler dans un fauteuil jusqu’au pied de l’autel. — A droite du catafalque, les Pairs ; — un peu au-dessus, le Conseil d’État. — A gauche du catafalque, les Députés. A l’entrée du dôme, la cour de Cassation, la cour des Comptes, le Conseil royal de l’instruction publique, l’Institut, le Collége de France, les doyens des Facultés, la Cour royale, les officiers-généraux de l’armée et de la marine, etc. Dans la nef, les officiers de l’armée impériale, l’état-major des Invalides, l’École Polytechnique, etc. Vers deux heures, le canon des Invalides annonça que le cortége se présentait à la grille d’honneur. L’archevêque de Paris et son clergé, vêtus de violet, comme pour l’office des martyrs, allèrent recevoir le corps sous le porche drapé. En ce moment, du haut de l’es trade placée en avant des orgues, les trombonnes et les contre-basses firent entendre une marche d’un double caractère, à la fois funèbre et triomphal. Le canon retentissait au dehors ; la garde nationale présentait les armes ; les invalides serraient les sabres à leurs épaules, et le cercueil entrait, porté sur les épaules des soldats et des marins. Le prince de Joinville, l’épée à la main, marchait en tête. Celui qui revenait ainsi était un demi-dieu ; c’était le vainqueur de Rivoli, d’Austerlitz, de la Moskowa, le grand défenseur de la dignité française, le plus glorieux représentant de notre démocratie en Europe.

La solennité à ce moment fut admirable. Les assistants étaient debout, la tête découverte, les yeux et les bras tendus vers ce cercueil dans lequel reposaient tant de gloire et de grandeur. Des invalides, qui faisaient la haie sur le passage du corps, s’étaient agenouillés malgré la consigne ; les autres essuyaient des larmes roulant sons leurs paupières. Le spectacle était sublime. Parmi ceux-là, du moins, nul ne revenait par le repentir, nul n’avait trahi la France.

En ce moment le roi, qui pouvait prendre sa bonne part dans le triomphe de cette journée, quitta la place qu’il occupait dans le dôme, à la droite de l’autel, avec la reine, M. le duc d’Orléans, M. le duc et Mme la duchesse de Nemours, M. le duc d’Aumale, M. le duc de Montpensier, Mme la princesse Adélaïde. S. M. a salué en passant la Chambre des Pairs, placée à la droite du catafalque.

Ensuite, elle s’est avancée, suivie des princes, jusqu’à l’entrée de la nef, où le cercueil venait de s’arrêter.