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Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/21

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L’ÉCRIN DU RUBIS

Dépouillée de ses voiles la Femme cesse aussitôt d’être le mystère qu’elle a été pour nous jusque-là. Elle redevient une femme pareille à toutes les autres ; elle perd son style et son cachet personnels. La femme nue est un caprice qu’il ne faut s’offrir que rarement, en laissant à sa porte toute envie de retour : en cette minute du don de sa nudité par quoi Ève croit nous avoir enchaîné pour toujours, elle a épuisé souvent à tout jamais le sortilège de sa séduction. Elle ne le tient que du mundus muliebris : c’est lui qui est la diversité, l’esprit, le style, et pour tout dire, l’attrait de la Femme. Son champ est immense, et s’étend jusqu’où le vent du caprice perpétuellement changeant diffuse le parfum d’Ève, jusqu’où l’imagination porte avec soi le nostalgique rêve de sa beauté. C’est tout le décor de sa vie, de sa chambre à son salon, de son cabinet de toilette à son boudoir, dont chaque meuble évoque une de ses poses, un de ses gestes, un de ses abandons, une de ses rêveries, dans le demi-jour des rideaux tirés, dans le silence encore chargé de son haleine, de ses moites alanguissements, et du langoureux murmure de sa traîne sur la mule de Cendrillon.

Domaine de l’illusion, paradis des joies artificielles et pourtant si profondes, il n’a d’autres limites que celles de l’art suprême de la volupté, la Mode. Il va du premier