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Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/83

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L’ÉCRIN DU RUBIS

sotte timidité qui le retint de pourfendre ou de baisser le pantalon sans couture dont elle s’était protégée le jour d’un premier rendez-vous avec lui. Sa rancune ne pouvait avoir pour cause l’offense d’avoir été refusée, car les intentions de Metschersky qui la comblait d’envois de camélias parlaient assez clairement ; elle tenait à la déception de sa volupté. S’il n’y avait pas eu une intention vicieuse dans son choix d’un pantalon clos quand elle était décidée à se livrer, elle eût interprété la retraite de son amant comme une marque de son respect pour elle. Il s’en fût gardé en présence d’un pantalon bâillant où il eût deviné un consentement tacite. Mais cette jolie femme très poussée dans les excentricités de la Mode et qui fut une des premières à fumer la cigarette dans les salons, était moins une chercheuse d’esprit, pour bas-bleu qu’on l’ait dite, que de sensations rares. Elle était de celles qui n’abandonnent rien au hasard dans leurs rencontres galantes, qui, de la chemise à la chaussure, ont calculé à l’avance tous les effets psychologiques des diverses parties de leur toilette et jugé sur leur propre émotion sensuelle devant la glace de ce qu’il en sera dans les bras de leur amant. En mettant un pantalon fermé, Mme de Caraman pensait à la fois à procurer à Elim l’occasion de lui faire violence et à se préparer un plaisir de gourmet, savourant à l’avance rien qu’à se voir ainsi engaînée d’une manière bien close depuis la cheville, les délices épicées de la résistance.