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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/112

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RUMENGOL, LE PARDON DES CHANTEURS

soleil du matin caressait de ses premiers feux et où ses derniers rayons s’attardaient longtemps. Les troupeaux paissaient là, épars sur les pentes, gardes par des novices qui les surveillaient d’un œil et, de l’autre, s’exerçaient à des lectures de piété dans des rouleaux de parchemin surchargés de lourdes écritures gothiques. Là aussi étaient les champs, les cultures dont les moines robustes avaient le soin. Les défrichements gagnaient peu à peu les sommets lointains, ouvraient dans la profondeur des fourrés de larges éclaircies.

Un bras de mer enserrait les terres de l’abbaye, contournant le pied des collines, pénétrant vers l’est dans les contreforts schisteux de la Montagne-Noire, évoquant la vision d’un glaive d’archange, d’une grande lame tordue et flamboyante. Du côté de l’occident, il s’évasait en une méditerranée pacifique aux vaguelettes crêpelées, telles que des frisons d’or.

Ce qui donnait plus de prix encore à cette oasis de verdure et d’eau calme, c’étaient les lignes austères qui, dans la direction du Nord, fermaient l’horizon. On devinait un pays nu, tourmenté,