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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/134

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RUMENGOL, LE PARDON DES CHANTEURS

eût pu s’y attendre, mais une complainte mystique, au rythme alangui, le cantique populaire de Notre-Dame de Rumengol :

Lili, arc’hantet ho dêliou,
War vord an dour ’zo er prajou ;

Doué d’ezho roas dillad
A skuill er meziou peb c’houéz vad…

Des lys, aux feuilles argentées.
Sont au bord de l’eau, dans les prées ;

Dieu leur donna des vêtements
Dont l’odeur au loin embaume les champs…

Le chœur des troupiers reprend chaque strophe, lui communiquant une ampleur immense ; et le chant semble fuir au loin derrière nous, emporté dans un vent de vitesse, avec les grandes fumées blondes qui font sillage aux deux flancs du train. C’est une sorte d’églogue religieuse, doux-fleurante, imprégnée d’un double parfum de nature et de piété. Elle évoque dans l’atmosphère du wagon, sans air et sans jour, où nous sommes parqués, des visions de courtils lumineux, de côteaux boisés, d’eaux courantes au creux des