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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/142

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RUMENGOL, LE PARDON DES CHANTEURS

rieuse, d’une infinie délicatesse de teintes, demeure épandue, renvoyée peut-être par les miroirs lointains de la mer. Et, dans cette auréole qu’on dirait surnaturelle, Rumengol se détache, avec l’extraordinaire netteté d’un village d’Orient, aux couleurs féeriques et invraisemblables. La flèche de l’église est d’un rose vif, comme si on l’avait taillée dans la Pierre Rouge d’autrefois. Elle apparaît comme le centre de tout le paysage qui se groupe autour d’elle, figé dans une adoration muette et, en quelque sorte, prosterné. Les choses ont des attitudes de prière, de longs agenouillements, et un murmure s’exhale des champs, des landes, des prés, qui vous remue le cœur, en fait se dégager le parfum subtil des vieilles oraisons désapprises. Voici que je me mets à fredonner avec le conscrit les strophes du cantique local

Lili, arc’hantet ho délliou…

D’une friche voisine, un autre refrain nous répond, mais hurlé à tue-tête et d’un caractère singulièrement profane. C’est une bande de mate-