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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/164

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RUMENGOL, LE PARDON DES CHANTEURS



De souper, hélas ! souvent je me dois passer
Et coucher dehors la nuit, ô la triste pénitence !
Loin de me soumettre pourtant, je me révolte ;
« Vieil étourdi ! » est le nom dont je gratifie mon père.

Ma petite mère est tendre et cherche à m’excuser :
Au lieu de lui en savoir gré et de lui éviter l’angoisse,
Je l’appelle « face rousse ! » et c’est tout ce que je trouve pour la remercier.
Il n’y a pas à dire ; décidément, je suis un être incorrigible…

De ces turbulences, de ces effronteries de gamin, il se corrigea avec l’âge, mais, le fond d’indiscipline qui était en lui, il ne s’en défit jamais. Sa veuve, qui n’eut pas précisément à se louer de ses façons, a retenu de lui l’image d’un homme très doux, d’une inépuisable bonté de cœur dans les circonstances ordinaires de la vie, mais incapable de se gouverner lui-même et impatient de toute contrainte. Il n’avait de mesure en rien. Souvent il se mettait à pleurer à chaudes larmes, sans qu’on sût pourquoi. Il aimait à s’envelopper de mystère, n’ouvrait à personne sa pensée, détestait les questions. Ce qui frappait surtout chez lui, c’était son humeur vagabonde. Il conserva jusqu’à