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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/165

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AU PAYS DES PARDONS

sa mort le tempérament inquiet et aventureux d’un poulain sauvage. Pour peu qu’on lui fît sentir l’entrave, il se cabrait. Le maître chez lequel il servait lui ayant reproché de « muser » au lieu d’avoir l’œil sur le troupeau confié à ses soins, on sait comment il prit la chose. Le soir de ce jour-là, le troupeau rentra sans le pâtre. Yann ne reparut à Saint-Drien que dix ans après. Le village avait changé d’aspect dans l’intervalle la plupart des masures s’étaient donné des airs de maisons, avaient remplacé leurs cloisonnements d’argile par des murs en pierres, leurs toits de chaume par des ardoises. Une seule était demeurée la même, et c’est à la vitre de sa lucarne qu’il vint heurter. Il ne doutait point que Marie-Françoise, sa petite amie d’autrefois, ne l’y attendît. Il la retrouva, non pas telle qu’il l’avait quittée, mais telle qu’il souhaitait de la revoir. Ils s’épousèrent « devant Dieu et le Gouvernement ». Le lendemain des noces, la jeune femme dit à son mari :

« — Yann, mon amour, il faut songer à ceux qui naîtront de nous. Il y a dans notre ciel un