Aller au contenu

Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/253

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
232
AU PAYS DES PARDONS

tr’ouverte, saluaient le postillon d’un lazzi, les voyageurs d’un souhait de bon voyage. À l’animation d’autrefois a succédé, hélas ! un morne silence. Les chemins de fer ont tué les messageries, et les machines les métiers à main. De ceux-ci, il subsiste peut-être une dizaine, et qui chôment plus souvent qu’ils ne travaillent. Au commencement du siècle, ils étaient environ cent cinquante, où se venaient approvisionner de toile à voile tous les ports du littoral cornouaillais. Du matin au soir et d’un bout du bourg à l’autre retentissait alors, selon l’expression d’un habitant du lieu, l’allègre chanson de la navette.

On vous contera que saint Ronan fut l’inventeur de cette industrie, qu’il la pratiqua lui-même — sans doute dans l’intervalle de ses promenades — et l’enseigna au penn-tiern, son compagnon de prière. Avant lui les pêcheurs se contentaient de suspendre des peaux de bêtes aux mâts de leurs embarcations. Il fit planter du chanvre, montra l’art d’en tisser les fibres. Une source d’abondance et de richesse ruissela sur le pays. L’opulence des bourgeois de Locronan devint aussi proverbiale