Aller au contenu

Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/26

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
5
SAINT-YVES, LE PARDON DES PAUVRES

encore le fredon, de plus en plus lointain, de leurs voix : on eût dit un essaim d’abeilles voyageant d’arbre en arbre, dans la profondeur sonore de la nuit…

Cette rencontre m’est restée présente, entre mille autres, faites dans les mêmes parages, — sans doute à cause de l’impression de mystère qu’elle m’a laissée.

C’est une tradition en Bretagne que chaque saint a sa spécialité curative. Maudez guérit des furoncles ; Gonéry, de la fièvre ; Tujen, de la morsure des chiens enragés. Yves, lui, est, selon l’expression populaire, « bon pour tout ». De là sa supériorité. On peut s’adresser à lui en n’importe quelle occurrence. Lorsque saint Yves s’est mis une chose dans la tête, il en vient toujours à bout. Telle est la conviction générale. Aussi, tandis que la plupart des vieux thaumaturges locaux ont vu, en ces derniers temps, décroître leur prestige, le sien n’a fait qu’augmenter ; comme me disait une vieille, il les dépasse tous de son bonnet carré. Il est aux yeux des Bretons, le savant, le docteur par excellence ; et ils ont