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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/25

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AU PAYS DES PARDONS

dessein était de passer la nuit en oraison, dans l’église, de faire, comme elles disaient, « la veillée devant le saint », puis de s’en retourner chez elles, après la première messe, toujours pieds nus et à jeun.

« — Et vous portez ces cierges, ainsi allumés, depuis Pleumeur ?

« — Sans doute. »

« — Pourquoi ? »

« — Parce que cela est dans notre vœu. »

« — Ce vœu, peut-on savoir quel il est ? »

Ma question, paraît-il, était indiscrète. Les femmes se regardèrent entre elles, et la plus âgée des trois, figure sèche et basanée de pilleuse d’épaves, me répondit avec dureté :

« — Vous n’êtes pas « Monsieur saint Yves béni, » ce me semble. »

En même temps elle se levait, faisant signe à ses compagnes. Je les vis s’enfoncer dans l’obscurité, l’une derrière l’autre, à la file, avec des arrêts subits, dès que la flamme des cierges, échevelée par le vent de la marche, menaçait de s’éteindre. J’étais aux portes de Tréguier que j’entendais