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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/263

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AU PAYS DES PARDONS

habité. Comme personnel, un employé unique, une femme, dont la principale besogne consiste à regarder passer de temps à autre quelques wagons et à écouter tinter, le soir, des angélus lointains. Un étroit ruban pierreux conduit à une route vicinale, à une de ces délicieuses et minuscules routes bretonnes qui s’en vont, comme la race elle-même, d’une allure de flânerie, s’attardent en mille détours et se laissent mener par leur rêve pour n’aboutir nulle part. On voyage dans une ombre lumineuse, entre des talus tapissés d’un fouillis de plantes, de fleurettes pâles, d’herbes longues et fines pendantes comme des chevelures. On ne voit, on n’entend rien que le reflet mouvant des feuillages sur la chaussée criblée de gouttes de soleil et un léger bruit d’eau dans les cressonnières aux deux bords du chemin.

Brusquement, dans une éclaircie, surgit la montagne sacrée, la croupe encore fumante des buées de l’aube. Des silhouettes de pélerins se dessinent, imprécises, sur la crête et le long des pentes. Les Troménies individuelles, — plus fécondes en grâces, dit-on, sans doute en tant que plus conformes à