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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/289

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AU PAYS DES PARDONS


Qu’il fait bon respirer l’air de là-haut, s’éventer aux souffles de l’Atlantique et humer la grande fraîcheur qui se lève de l’occident, aux premières approches du soir !…

Le point du plateau où nous sommes parvenus a gardé le nom de Plaç-ar-C’horn. Kébèn dut avoir la main robuste pour faire voler jusqu’ici, d’un coup de battoir, la corne du bœuf de Ronan. Le chariot qui portait le cadavre du saint stationna, dit-on, quelques minutes en cet endroit, sans doute afin de laisser respirer l’attelage, mais aussi afin de permettre au thaumaturge d’embrasser une dernière fois du regard son horizon préféré. Il y a quelque dix ans, on y a érigé sa statue, en granit. Elle a un grand tort : celui de n’avoir point été sculptée par n’importe quel tailleur de pierres dans la manière si expressive des primitifs imagiers bretons. Au socle est adossée une chaire d’où un prêtre va tout à l’heure haranguer la foule. Et ce sera vraiment le Sermon sur la Montagne, au centre d’un paysage comparable pour la délicatesse, pour l’harmonieuse sobriété des lignes