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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/331

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AU PAYS DES PARDONS

pour des barques, d’avoir un jour à rêvasser en paix Les filets prennent le soleil, appendus aux mâts. Et la baie s’étale, vide, à perte de vue, dominée seulement vers le nord par les blancs éboulis de Morgat et par les aiguilles de pierre du Cap de la Chèvre.

J’ai voulu faire, ce matin, le trajet de la Palude par le chemin des piétons. La file des pèlerins s’engage dans les bois de Plomarc’h. Des étangs mystérieux dorment sous les hêtres. Ici, la fille de Gralon, Ahès, qu’on appelait encore Dahut, venait autrefois avec ses compagnes, les blondes vierges de Ker-Is, laver son linge royal : l’eau des fontaines a, dit-on, retenu son image, et les mousses, la fine odeur de ses cheveux. À travers le réseau des branches, la mer luit. Elle ne nous quittera guère, au cours du voyage, toujours adorable et jamais la même, déployant devant le regard, avec une sorte de coquetterie, les prestiges sans nombre, la souplesse infinie de son éternelle séduction. C’est sa fête — ne l’oublions pas — c’est sa fête aussi bien que celle de sainte Anne que les Bretons du littoral cornouaillais