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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/59

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AU PAYS DES PARDONS

au sérieux et conduisit Yves, comme par la main, jusqu’à l’âge d’homme. Vous savez que celui-ci mourut prématurément. Jehan s’obstina à vivre jusqu’à ce qu’il lui eût été donné d’assister à la canonisation de son élève. Il vint déposer à l’enquête, et ce dut être, j’imagine, un très beau spectacle. Il avait plus de quatre-vingt-dix ans ; néanmoins, il parla avec un enthousiasme si juvénile que, non content de convaincre son auditoire, il le fit pleurer. C’est dans cette attitude qu’il eût fallu le représenter sur une des faces du tombeau. Je l’y ai cherché en vain. C’est une lacune fort regrettable. »

… Je reproduis avec une fidélité textuelle les termes de la causerie. Quant au reste, hélas ! — quant à cette grâce à la fois si simple et si subtile dont il parait les moindres choses, le prestigieux conteur en a emporté le secret.

J’étais à Tréguier, le lundi 8 septembre, deuxième jour du Triduum. Le contraste était saisissant, de ces vieilles rues engourdies depuis des siècles dans une somnolence de cloître, et de ces longues foules sinueuses et grouillantes,