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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/65

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AU PAYS DES PARDONS


Il n’y a pas en Bretagne, il n’y en a pas un,
Il n’y a pas un saint comme saint Yves.

Cela fit l’effet d’une diane dans la cour d’une caserne endormie. Un grand frisson secoua la foule. Les plus engourdis sursautèrent. Un chœur formidable se mit à répéter chaque verset à la suite du chanteur. Ce fut une clameur folle, éperdue, dont toute la cathédrale vibra. Les cierges eux-mêmes, comme ranimés, brûlèrent d’une clarté plus joyeuse. Puis, les voix s’éteignant, tout s’assombrit de nouveau ; et l’on ne vit plus de lumineux au fond de la nef que le blanc cadavre de saint Yves, veillé par un peuple de pauvres gens…

Le lendemain, dans une flambée de soleil, à l’issue de la grand’messe, les processions débouchaient du porche. Vingt paroisses étaient là, clergé en tête, et tous les évêques bretons, successeurs des Pol, des Brieuk, des Tudual, et tous les béguinages de la vieille cité monacale, les coiffes rabattues sur le visage, les yeux décolorés et craintifs. Les cloches se mirent en branle, non seulement celles de la cathédrale et des couvents