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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/71

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AU PAYS DES PARDONS

de le rendre, dans l’autre monde. Ainsi les anciens Celtes se fixaient des échéances par delà le terme de cette vie. Baptiste différait en ceci des pauvres gens ses confrères : non seulement il ne demandait pas l’aumône, mais il la repoussait, avec une colère mal contenue, si gracieusement qu’elle lui fût offerte. Là-dessus il était intraitable. Il prétendait que le pain qui n’a pas été gagné étouffe qui le mange. En descendant, le matin, je le trouvais souvent installé dans l’âtre de la cuisine, et fumant. Il avait un sentiment inné de la délicatesse, prenait toujours prétexte de sa pipe à allumer ou d’une nouvelle à dire pour entrer dans les maisons. Encore fallait-il qu’il eût en sympathie les hôtes. Moi, il m’aimait pour les choses que j’aimais, — pour tout le passé breton dont je tâchais dès lors à rassembler les reliques. Quant à mes parents, il ne connaissait dans son entourage personne qui leur fût comparable. En quoi il avait bien raison, l’excellent homme !… J’allais à lui, nous nous serrions la main et l’on causait… Survenait ma mère qui le priait à déjeuner « sans façons ».

— Au cas où vous auriez quelque besogne à