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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/78

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SAINT-YVES, LE PARDON DES PAUVRES

de mauvais augure ; machinalement, nous pressâmes le pas. Des corbeaux, perchés dans les trous de la flèche, croassaient pour appeler les retardataires de la bande, en secouant leurs longues ailes noires qui, dans l’atmosphère trouble du crépuscule, nous paraissaient démesurées.

« — Hâtons-nous hâtons-nous ! » murmura Baptiste.

Ce lui fut une occasion, quand nous eûmes perdu de vue le clocher sinistre, de me raconter sa légende.

Ceci se passait peu d’années après la mort d’Yves Héloury. Déjà les pauvres, ses protégés, avaient fait de son bourg natal un lieu de pèlerinage. Ils y venaient comme aujourd’hui de toutes parts, en très grande dévotion, et ceux d’entre eux qui habitaient l’armor traversaient nécessairement pour s’y rendre les terres de Saint-Michel. Or, Saint-Michel était en ces temps une espèce de villégiature de nobles. Les gentilshommes de Tréguier y avaient presque tous leur maison de campagne où ils s’installaient avec leur famille pendant la belle saison, depuis la mi-avril jus-