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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/83

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AU PAYS DES PARDONS

nous étions maintenant il faisait très sombre ; des arbres au feuillage épais, des châtaigniers peut-être, formaient voûte au-dessus de nous, et, les branches s’abaissant jusqu’aux talus qui bordaient la route, on marchait à tâtons comme dans le noir d’un souterrain. Tout à coup des abois de chiens, un grand bruit de voix, et la vive lueur d’une flambée d’ajoncs secs. Nous franchissions le seuil du manoir de Kervarzin.

« — Y aura-t-il logement pour deux pauvres de plus, s’il vous plaît ? » clama Baptiste d’un ton enjoué.

La vaste cuisine était déjà pleine de mendiants, — d’aucuns debout, adossés à la demi-cloison en planches qui garantit du vent de la porte le foyer des fermes bretonnes ; — d’autres accroupis un peu partout sur le sol de terre battue, ou assis, les genoux au menton, sur un petit banc qui courait le long des meubles, d’un bout à l’autre de la pièce.

Aux paroles de Baptiste, un paysan à la chevelure bouclée et grisonnante, à la mine joviale, se leva de l’âtre et s’avança vers nous.