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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/90

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SAINT-YVES, LE PARDON DES PAUVRES


Quand le pain, le porc et le bœuf ont été engloutis, le chef de la tribu nomade, un grand diable à la peau cuivrée comme un zingari, tient au saint ce discours, après s’être essuyé la bouche du revers de sa manche :

« — O le plus vénérable et le plus discret des hôtes, je serais le plus ingrat des obligés si, ayant reçu de toi cet accueil, je ne t’apprenais dès à présent quelle est notre condition. Peut-être, quand tu sauras qui nous sommes, nous rejetteras-tu à la nuit ténébreuse et à la pluie glacée. Ta bonne foi du moins n’aura pas été surprise.

« Je me nomme Riwallon Priziac, aux confins de la Cornouailles et du pays de Vannes, fut mon lieu de naissance. De mon métier, je suis jongleur. J’excelle à rimer les sônes d’amour et les chants de guerre ; je n’ai point mon pareil pour mettre en action les vies des héros et les légendes miraculeuses des saints… Celle-ci est Panthoada, ma femme, la compagne dévouée de ma longue misère ; elle joue de la viole et dit la bonne aventure ; de plus elle connaît les vertus des herbes et l’art de guérir par oraison enfin elle