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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/89

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AU PAYS DES PARDONS

« — Vite, vite, mes enfants. Je vais rallumer le feu !… Venez ça, je vous attendais !… »

Certes, oui, il les attendait… D’où ils viennent ? Qui ils sont ? Combien ils sont ? Que lui importe !… Il me semble le voir s’agenouillant là, sur cette pierre où le père Yaouank murmure les grâces, et soufflant cette braise qui s’éteint, comme faisait tantôt la fille de ferme, et y jetant, comme elle, à pleines brassées, les gerbes d’ajonc roux qui flambent clair. Les pauvres gens se sont avancés : ils se sont assis sur les escabelles, aux deux coins de la cheminée, et leurs haillons fument à la douce chaleur, et leurs visages, ruisselants d’eau, tout bleuis de froid, s’éclairent et rayonnent, et leurs yeux échangent des regards qui disent :

« — Qu’on est donc bien chez ce brave homme !… »

Yves est allé au garde-manger, il a pris la tourte de pain blanc, un reste de porc et de bœuf salé, et il les apporte aux vagabonds pour qu’ils s’en régalent :

« — Rassasiez-vous, mes amis, rassasiez-vous ! »