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Page:Le Negre du Narcisse, trad. d Humieres, Gallimard 1913.djvu/67

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pareils à ceux d’un gong. La seconde d’après montra Belfast penché sur l’autre. Il lui disait plaintivement :

— Ne fais pas ça ! Ne fais pas ça, Jimmy ! Ne sois pas comme ça. Un ange n’y tiendrait pas, tout malade que tu es.

Il nous lança un regard circulaire, debout au chevet de Jimmy, sa bouche comique tordue et les yeux gros de pleurs, puis s’efforça de rétablir les couvertures défaites. L’incessant murmure de la mer emplissait le gaillard. James Wait était-il effrayé, touché ou contrit ? Il restait sur le dos, pressant son flanc d’une main, immobile comme si la visiteuse attendue était arrivée enfin. Belfast, dans sa gêne, remuait les pieds répétant d’une voix émue :

— Oui, nous savons. Tu ne vas pas, mais… Tu n’as qu’à dire ce que tu veux, et… On sait tous que tu es bas, très bas…

Non ! James Wait décidément n’était ni touché ni contrit. À vrai dire, il parut quelque peu surpris. Il se dressa sur son séant avec une rapidité et une aisance incroyables :

— Ah ! vous me trouvez bas, pas vrai ! dit-il lugubrement, de son baryton le plus clair (à l’entendre parler quelquefois on aurait juré que cet homme-là n’avait rien du tout). Hein ?… Eh bien faites comme on doit alors ! Dire qu’il y en a parmi vous qui n’ont pas assez de malice pour mettre une couverture droite sur un malade. Là ! Pas la peine. Je claquerai comme je pourrai.

Belfast se détourna mollement avec un geste découragé. Dans le silence du gaillard, plein de spectateurs attentifs, Donkin articula :

— Ben, nom de Dieu, et ricana.

Wait le regarda. Il le regarda d’un œil, ma parole, amical. Nul ne pouvait prévoir ce qui plairait à notre