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Page:Le Parnasse contemporain, III.djvu/357

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Pour parler au Vengeur j’ai mille et mille voix
Dans les flots de la mer et les feuilles des bois,
Et, quoi que vous tentiez, vous ne ferez pas taire
Le cri du sang versé dans l’âme de la Terre ! »
Caïn ! Caïn ! entends monter vers l’Éternel,
L’angoisse filiale et fumante d’Abel !

« Mais, cependant, Seigneur ! vos volontés soient faites !
S’il vous plaît de livrer vos Confesseurs aux bêtes,
Comme au temps des Césars et des faux dieux païens,
Oh ! du moins, faites-moi mourir avec les miens !
Et sois doux au vieillard, vieux soldat de ta cause,
Qui ne peut plus, ici, t’être utile à grand’chose ;
Car ses mains tremblent trop ; et son esprit éteint
Erre, comme un fantôme, en son corps qui se plaint.
A défaut de ceci, Dieu très-bon que j’implore,
Obscurcis sous ta main cet œil qui voit encore,
Et crève de tes doigts cette oreille, par où
J’entends tant de clameurs qu’elles me rendent fou !
Fais la nuit dans mon corps pour mieux m’éclairer l’âme !
Car je ne veux plus voir la main du Reître infâme,
L’emprisonnant dans la caverne des voleurs,
Teindre ton doux Jésus du sang de ses meilleurs,
Si qu’ils font de ton Fils, mort pour notre franchise.
Un Cardinal pourpré de leur sanglante Église ! »

Il se tut, le menton incliné sur le sein ;
Puis, d’un coup, se dressant : —
Puis, d’un coup, se dressant : — « Le tocsin ! Le tocsin !