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Page:Le Stylet en langue de carpe.djvu/185

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étroits, aux draps frais, sentant la cendre et l’iris. J’ouvrais une trop petite fenêtre pour regarder, avant le sommeil, tourner un peu les étoiles. Rubbia admirait aussi. Nous rêvions.

Je ressentais alors aigument ce besoin d’anthropomorphisme qui tient les hommes au fond de leur chair. Les noms des groupes stellaires passaient dans mon esprit avec les légendes qui les accompagnent. Algol et ce mystérieux satellite qui tous les jours réduit sa lumière, Arcture qui dirigeait jadis les navigateurs, Cassiopée et Aldebaran, Betelgeuse et Orion. Là haut une infinitude tragique faisait ressortir la dérisoire brièveté de notre destin. Devant les durées suprahumaines, la voie lactée s’enroule sans doute comme la fumée d’une cigarette et se dissoudra pareillement. Tout ce qui meuble les espaces doit être agité aussi follement que les particules moléculaires le sont par le mouvement brownien ; cela flotte, se heurte et se brise, danse sans rythme et sans raison, selon les contingences de l’absolu. Et notre