Aller au contenu

Page:Le Tour du monde - 15.djvu/302

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

À l’extrémité du préau, en face de l’entrée, un grand escalier d’une vingtaine de marches en dalles de granit, conduit à une esplanade supportant, à droite, un autre corps de garde, et à gauche des habitations de bonzes. Enfin, au-dessus de l’esplanade, un escalier plus étroit et plus court que le premier aboutit au jardin qui précède le temple de Tjoôdji. Un troisième corps de garde y est installé, au pied des mâts ou flottent les pavillons de la Hollande et de la Suisse.

La façade principale des bâtiments autrefois sacrés se cache à demi derrière des touffes d’arbustes toujours verts. En m’approchant du péristyle, je le vois occupé par un groupe d’officiers japonais. L’un d’eux me complimente en hollandais et n’annonce qu’il a été chargé par son gouvernement de m’offrir ses services en qualité d’interprète ; puis il me présente le commandant de la garde, qui est, dit-il, l’un des aides de camp du Taïkoun. De son côté, le commandant nous fait les honneurs de son quartier général. Il l’a établi dans l’ancien sanctuaire, qui ouvre sur le péristyle, et il déclare qu’il y passera toutes les nuits. Nous convînmes que M. Kaiser et M. Schnell occuperaient une pièce adjacente, reliant le temple aux édifices et aux galeries du cloître, qui formaient l’aile droite de la bonzerie et la résidence exclusive de la mission.


Idole et grotte du Tjoôdji. — Dessin de A. de Bar d’après un croquis de M. Humbert.

À l’une des extrémités de ce massif de constructions ; à peu près sur l’alignement des mâts de pavillon, nous avons établi la cuisine et un petit atelier à l’usage de l’habile photographe Béato, récemment arrivé de l’Inde et de la Chine à Yokohama ; et nous réservons une longue galerie vitrée pour l’exposition des objets d’art et d’industrie que les courtiers de la cité viennent y étaler. L’autre extrémité, qui s’avance dans un enclos semi-circulaire derrière le temple, se compose de trois grandes pièces contiguës : le salon, ma chambre à coucher et la salle à manger, toutes trois entourées d’une galerie ouverte. C’est la partie la plus paisible et la plus fraîche de la bonzerie. Un étang bordé d’iris et de nénufars occupe le centre de l’enclos ; il est alimenté par une source qui suinte d’une grotte voisine, tapissée de plantes grimpantes. À côté de cette grotte, on voit dans une niche entourée de feuillage, une ancienne idole de grès, qui possède encore son petit autel et son tori. Un pont rustique jeté sur le ruisseau conduit à un sentier qui serpente parmi les arbres et les rochers jusqu’aux palissades supérieures de l’enclos. Là, sous un abri de pins et de lauriers, l’on a taillé un reposoir d’où la vue domine les jardins et les bâtiments du Tjoôdji, et se perd sur la rade et les forts qui la protégent.

À l’heure du coucher du soleil, ce petit tableau est plein de charme. Le ciel et la baie s’animent des plus riches couleurs. Le feuillage des collines resplendit d’une