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LE POISSON D’OR

C’était pareillement à Larmor où la procession, descendant la jetée cyclopéenne, me renvoyait comme un reflet de ces religieuses magnificences avec un écho affaibli du plain-chant. L’encens brûlait sur l’une et sur l’autre rive, et tout là-bas, sur la plage de Groix, une troisième théorie, que la distance faisait muette, apparaissait au travers de la brume poudroyante des beaux jours, semblable à un mystérieux mirage.

Quand la liturgie se taisait, la musique militaire embouchait ses cuivres et battait ses cymbales vibrantes, qui remuent si étrangement le cœur.

Et de loin comme de près, les cloches sonnaient toujours, disant aux pélerins attardés sur la lande : Hâtez-vous vers la fête de l’été, venez sanctifier la moisson de l’Océan, ce sont aujourd’hui les grandes Rogations de la mer !

D’où sortaient toutes ces barques ? Elles couvraient l’eau entre Gavre et Larmor comme l’écaille habille le poisson. Nul n’aurait su en dire le nombre. Il y en avait pour tous et pour toutes. Plus les chevaux abondaient, plus les charrettes foisonnaient, plus les piétons se serraient à la grève comme les fourmis, quand un pas imprudent a bouleversé leur république, plus il y avait de barques vides, attendant les nouveaux venus.

— Quatre sous la place pour la bénédiction des couraux, aller, retour et séjour ! Quatre sous pour entendre parler le sous-préfet, pour voir les trois curés et la marine On s’arrête à Larmor, si l’on veut, pour boire une écuellée de cidre chez maman Tabac et dire un Ave à Notre Dame. Quatre sous les hommes et les femmes, deux sous les petits enfants et la troupe.