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Page:Le poisson d'or.djvu/50

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LE POISSON D’OR

Le Bruant, quand même il eût valu deux fois ce qu’il valait, n’aurait pu gagner cette nuit-là contre le vent et la mer. Il y a loin des roches de Gavre à la pointe ouest de Groix.

Et d’un. Alors, d’où lui venait le sac de cuir avec les douze mille francs en louis d’or ?

La barque que j’avais cru reconnaître pour le bateau du sous-brigadier avait le cap sur les grèves, entre le feu de Loc-Malo et la tour de Plouhinec. C’est là qu’est le château de Penilis.

Était-ce bien le bateau du sous-brigadier, et Bruant était-il dans le bateau ? Il faisait trop noir pour bien voir ; ne pourrais pas en lever la main devant des juges. Mais voici ce qui se passa cette nuit-là entre la tour de Plouhinec et le feu de Loc-Malo :

Tous les Penilis étaient déjà en émigration, sauf le fils aîné, M. Jean, qui s’était laissé embobiner un petit peu par les papiers de Paris. Il croyait à la révolution. M. Jean était bon, généreux et brave comme ceux de sa race ; à époque où Bruant fut soupçonné et chassé, c’était M. Jean qui l’avait empêché d’aller en prison. Bruant venait bien souvent lui demander l’aumône, et bien souvent aussi Bruant disait qu’il se ferait couper par morceaux pour M. Jean, vicomte de Penilis.

Or, ce n’était pas l’amitié des nobles que les commissaires de la République souhaitaient, ils voulaient leurs biens, et puis c’est tout. M. Jean, malgré qu’il était membre du club de Port-Louis, fut mis hors la loi, comme on disait, sous prétexte qu’il entretenait des relations avec son père et ses frères. Il fit argent de tout ce qu’il put et se décida enfin à sauver sa peau. Il n’était que temps.

Ses mesures étaient prises. Cette nuit dont nous par-