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Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/307

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L’année suivante, les deux cents représentations de la Tunique de Nessus, sa première pièce, le Raid hippique de Marseille-Paris.

L’année suivante, l’année où il triomphe avec la Toison d’Or, ce drame merveilleux, Archain, tourné au professionnalisme, gagne le Championnat du Monde à Copenhague, enlève la Coupe Gordon Bennett, le Circuit des Ardennes et le Grand Prix de Monaco aux courses de canots automobiles.

Telles sont les lignes principales de sa double carrière.

Dirai-je ses succès d’homme ? Paul Archain est grand, élégant, de gestes harmonieux, de visage à la fois très doux et très mâle. Chose inouïe : c’est un modeste. De là sans doute la vive sympathie qu’il inspire. Ceux qui le connaissent n’ont pas seulement pour son génie un respect religieux, pour ses prouesses une admiration sans bornes. Ils ont également pour lui une amitié affectueuse.

Et ils éprouvent aussi, à le fréquenter, une stupéfaction infinie, car Paul Archain n’est pas intelligent. Intelligent, peut-être le paraîtrait-il s’il n’était qu’athlète et sportsman. Mais il est, ne l’oublions pas, il est surtout l’auteur des Cimes et de la Toison d’Or, et, comme tel, il paraît lourd, vulgaire, d’aucuns disent franchement bête.

De fait, jamais un mot, jamais une réflexion qui révèle la qualité de son esprit. Jamais un éclair, jamais d’imprévu. Il semble ne point penser, ou du moins ce qu’il exprime de pensée est d’un ordre tellement inférieur qu’on en est toujours déconcerté. Ce n’est que préoccupations sportives, soucis d’entraînement, éloges de la force, discussions insignifiantes sur de petits points techniques.

Et l’on ne comprend pas. Comment ce cerveau-là peut-il secréter de belles idées ? Par quel miracle, les ayant sécrétées, peut-il ensuite les transformer en phrases divines ? Il suffit donc, quand on a du génie, de s’enfermer chaque soir, de neuf heures à minuit, comme le fait Paul