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Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/431

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À la flamme de ses yeux, à la fièvre de ses gestes, on connut son triomphe.

Urbain Lauzier en souffrit, dans sa vanité d’homme que le destin n’avait pas accoutumé aux défaites. Et puis, il aimait Diane à sa façon, comme un bel objet inutile dont l’acquisition était nécessaire à ses ambitions mondaines.

Cependant l’heure avançait. Les invités s’apprêtaient à partir. Diane proposa aux deux jeunes gens de les retrouver au Salon de l’Automobile. Ils acceptèrent. Et, une heure plus tard, un coupé de remise amenait le comte et sa fille devant la porte du Grand Palais.

Lauzier les attendait. On eut dit que ce milieu de luxe et de richesse lui donnait plus d’allure, lui convenait davantage. Il s’y sentait à l’aise, comme chez lui, et, prenant le bras du comte, il le dirigea, parmi les stands avec la désinvolture d’un habitué que tout le monde salue et d’un acheteur que l’on prend au sérieux.

D’Estrevel les avait rejoints, empressé, rayonnant d’espoir et de certitude, et tout de suite il avait accaparé la jeune file et lui disait de ces phrases quelconques, auxquelles l’amour sait donner une telle signification de tendresse et de dévouement. Mais, chose bizarre, Diane lui répondait à peine, distraite, attirée par les expositions, intéressée par les mille voitures diverses, par les formes nouvelles, les carrosseries inattendues, les inventions commodes, l’ingéniosité des perfectionnements.

Et peu à peu ce fut aux paroles de Lauzier qu’elle prêta attention, et ce fut à elle, plutôt qu’à son père, qu’il prodigua, lui, les explications techniques. Ils s’en allèrent par les avenues encombrées, suivis du comte et de d’Estrevel. Ils s’arrêtaient, marchaient et s’arrêtaient encore, et Lauzier se gonflait d’importance, fier de son rôle de cicerone.