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Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/494

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CONTES DU SOLEIL ET DE LA PLUIE

Deux de mes Élèves

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Parmi les nombreux mortels à qui j’inculquai le goût de la bicyclette, il en est deux qui eurent le rare privilège de m’avoir pour professeur d’équilibre, et ces deux-là ne sont pas les moins notoires de nos contemporains. Tous deux issus des grandes écoles de l’État, l’un s’est acquis quelque renommée d’abord comme polytechnicien, puis comme ingénieur des tabacs, puis comme romancier. L’autre a passé par l’École Centrale, puis par le Chat Noir, puis par différents théâtres où ses pièces ont plutôt réussi.

Je les ai connus la même année, au bord de la mer, L’un écrivait les Demi-Vierges, l’autre Lysistrata.

Et un matin du mois d’août 1892 — quatorze ans déjà ! — sur la jolie plage d’Étretat, Marcel Prévost me dit :

— Mon cher ami, à partir de la semaine prochaine, je dois me rendre presque chaque jour à Fécamp, 16 kilomètres à l’aller.

— À peu près autant au retour.

— La voiture m’ennuie. Si je louais une bicyclette ?

— Excellente idée.

— Combien de leçons me faudra-t-il ?

— Trois ou quatre ou cinq…

— Avec qui ?

— Avec moi, si vous voulez.

L’après-midi nous avions rendez-vous sur la route de la Passée.