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Page:Leblanc - Armelle et Claude, 1897.djvu/171

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ARMELLE ET CLAUDE

toute l’âme de la province. Certaines rues dorment aussi profondément que les boulevards de l’enceinte, et le passé les ensevelit sous son apaisement aussi bien que l’eau morte des douves. Les gens qui s’y promènent ne paraissent point déranger les plis de ce linceul.

Armelle et Claude y furent des intrus, d’abord. Des femmes aux fenêtres, des hommes à leur établi, levaient la tête et se souciaient d’eux. Ils faisaient une petite révolution dans les demeures et dans l’atmosphère immobile. Leur passage soulevait, comme des nuages de poussière, les commentaires et les hypothèses et laissait un sillon lent à se refermer. Mais l’ordre se rétablit peu à peu. On s’accoutumait à leur flânerie. Le sommeil des rues, la torpeur des êtres, le poids des âges l’emportèrent sur leur agitation. Le silence des siècles ne fut pas plus dérangé par la cadence de leurs pas que l’air par le vol d’un oiseau.

Ils erraient de préférence dans les sentes