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Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/172

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LECONTE DE LISLE

ménagement. Certes il hait l’inutile tapage, mais il n’a pas une nature « si discrète » qu’on l’a dit avec une trop complaisante ironie, il est essentiellement et courageusement combatif. Très ardent en ses convictions, exalté même, il est de tempérament intense et bouillonnant. L’échec de ses tentatives hardies en province, son long et désespérant emprisonnement à Bourbon, n’ont fait qu’exacerber une âpreté native. En le silence des méditations, il a goûté la joie mâle des spéculations élevées, il a plané dans une région de paix supérieure, mais parallèlement l’homme a pleuré aux heures sombres des jeunesses captives sur l’inaction, l’inutilité de sa vie : fiévreusement, impérieusement, l’être a tendu vers l’action belle et révélatrice des forces généreuses. C’est le clairon fatal qui sonne dans ses fièvres :


Debout ! Marchez ! courez ! volez, plus loin, plus haut !
Allons combattre encor, penser, aimer, souffrir ! (Ultra cœlos)


…… Cependant il ne faut pas désespérer : l’on pourrait peut-être accepter « ses conditions » : On lui promettait quelque chose de « fort beau » : « en attendant mieux 1.800 francs par an d’appointements fixes et l’impression aux frais de l’École sociétaire d’un volume de poésies prêt à être publié. » Ce serait enfin l’indépendance recouvrée et à jamais assurée, l’enthousiasme de la fière liberté, la faveur multiple du grand centre intellectuel, les promesses charmantes d’une gloire possible. On accepta ses conditions. Il put partir.

Elle fut belle et clémente au poète, la nature