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Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/247

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voués aux brutalités de l’action, aux divagations banales, aux rebâchages éternels des mesquines et pitoyables théories contemporaines, ne sont pas pétris du même limon que le sien ? Comment ne s’aperçoit-il pas que ces hommes paraissent s’inquiéter de la réalisation d’un idéal quelconque, parce qu’ils ont beaucoup plus de sang dans les veines que de matière cérébrale dans le crâne ? La grossièreté de leurs sentiments, la platitude et la vulgarité de leurs idées ne le blessent-elles point ! La langue qu’ils parlent est-elle semblable à la sienne ? Comment peut-il vivre, lui qui était l’homme des émotions délicates, des sentiments raffinés et des conceptions lyriques, au milieu de ces natures abruptes, de ces esprits ébranchés à coup de hache, toujours fermés à toute clarté d’un monde supérieur ? Une loi de nécessité harmonique n’enveloppe-t-elle pas et ne dirige-t-elle pas ce qui est ? les hommes ont été confinés par elle aux infimes échelons de la grande hiérarchie humaine.


Leconte de Lisle est évolutionniste ! Ce qui le choque dans les théories et les discours, c’est la croyance fanatique à une révolution tout accidentelle et prédestinée : ne croyons pas à une heure providentielle ; soyons plus humbles :


Ne me dis pas que la lutte est ouverte entre les deux principes moraux que nous confessions tous deux et les iniquités sociales de ce temps. Il y a bien des siècles que cette lutte est commencée et elle se perpétuera jusqu’au jour où le globe s’en ira en poussière dans l’espace, Mais il n’est pas qu’une seule façon d’y prendre part. Les efforts et les modes d’efforts varient en raison de la diversité, et la hiérarchie des esprits et les grandes œuvres d’art pèsent dans la balance d’un autre poids que cinq cents millions d’almanachs démocratiques