Aller au contenu

Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/443

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le « colibri », le « bengali », les « mouches d’or ». Çanta, Nurmahal, Leïlah ont l’élancement mol, la grâce brune et flexible, le charme fragrant des vierges créoles. Le palais en ruines de Nurmahal est conçu à l’image de ces vieux « emplacements » créoles, demeures jadis animées et magnifiques et dont la splendeur s’écroule sous le débordement d’une nature mélancolique et riche.

Ce n’est pas, comme on a pu le croire, les livres de Burnouf et le développement des études indianistes qui donnèrent à Leconte de Lisle l’idée de prendre l’Inde pour terre d’inspiration et patrie spirituelle.

Né dans une île de flore tout indienne il portait en lui un idéal sinon un tempérament hindou. Les ouvrages de Burnouf accessibles au public parurent de 1840 à 1845 ; et dès le recueil le Cœur et l’Âme, prêt à paraître en 1889, se trouve une Hymne au soleil où on lit :


Il est doux d’écouter les rossignols d’Asie
Épancher leurs accords de fraîche poésie
          Dans les roses de nos ravins.


Il a nettement conscience qu’il est un Oriental bien plus qu’un Africain ; il se donne naïvement pour un « rossignol oriental », c’est-à-dire pour le bengali qui chante aux buissons de l’île natale, île d’Orient où il apprit à admirer le soleil « du splendide Orient monarque solennel ». Dans une lettre simulée d’un Chinois à son ami il rappelle les années où a sous l’épais dôme des mangoustanis nous rêvions et adorions Fô, le père du soleil ». Lui-même il a de la famille dans l’Inde et c’est ainsi