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Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/442

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grecques. Et dans les montagnes aux nobles lignes de sculpture, montagnes parfumées de miel, vit une humanité candide, chantante et hospitalière. « L’ossature géologique, dit Taine, le marbre gris violacé affleure en rocs saillants, s’allonge en escarpements nus, découpe sur le ciel ses profils tranchés, enferme les vallées de ses pitons et de ses crêtes !… » Toute la terre créole ondule en pitons et se dentelle en crêtes.


Îles, séjour des Dieux ! Hellas, mère sacrée !
Oh ! que ne suis-je né dans le saint Archipel
Aux siècles glorieux où la Terre inspirée
Voyait le ciel descendre à son premier appel !


Il ne connut point l’époque des dieux, mais il l’imagina plus immorlellement que nul autre parce qu’il était né en une île divine comme la Grèce.

Bourbon fut aussi la terre orientale, l’Orient, l’Asie. C’est devant les couchers de soleil créoles, amaranthes et safranés, au milieu de la nature luxuriante et impassible de l’île ou encore par les nuits tropicales, trempées de tiédeur ou de rosée, que s’éveilla en lui le goût des religions hindoues. Lui-même l’a dit : l’Orbe d’or, la Ravine Saint-Gilles, le Bernica, ne sont autre chose que l’explication de son génie hindou par la nature qui berça son enfance et son adolescence. Il ne peignit d’ailleurs l’Asie qu’avec des couleurs judicieusement empruntées à la faune et à la flore de Bourbon. Dans Baghavat, Çunacépa, Nurmahal, Sous l’épais sycomore, se retrouvent « la mangue rouge », « les grenades vermeilles », les « bambous », le « giroflier », le jujubier », « l’açoka »,