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POÈMES TRAGIQUES.


KLYTAIMNESTRA.

Ne verse pas mon sang ! As-tu tout dit ? Arrière !
Prends garde à toi, si tu n’écoutes ma prière.
Crains d’entendre aboyer le troupeau haletant
Des Spectres de l’Hadès ! Mon cher fils, un instant !
Non ! non ! Tu ne veux pas sans doute que je meure…
Oh ! je voudrais vieillir dans l’antique demeure !


ORESTÈS.

Toi ! tu vivrais ici, toi ! Qu’en diraient les Dieux,
Les hommes, la maison, nos enfants, nos aïeux ?
Il faut mourir, il faut que le sort s’accomplisse.
Viens ! je vais te coucher auprès de ton complice
Qui gît là, dans son sang immonde, tel qu’un chien.
Désormais, comme hier, son lit sera le tien.
Puisque tu l’as aimé, rejoins qui te réclame,
Et rentre dans ses bras, afin d’y rendre l’âme !
Hâte-toi, hâte-toi, femme ! si tu ne veux
Que je te traîne par les pieds ou les cheveux !


KLYTAIMNESTRA.

Dieux ! Élektra, ma fille ! Encore une fois, grâce,
Mon fils !


ORESTÈS.

Mon fils ! Je suis aveugle et sourd.


KLYTAIMNESTRA.

Mon fils ! Je suis aveugle et sourd. Ô monstre ! ô race