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Page:Leconte de Lisle - Derniers Poèmes, 1895.djvu/199

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Qui seul, parmi tous ceux en qui ton nom s’efface
Baise avec des sanglots ton adorable trace !
Heureux qui de t’aimer fait son unique loi,
Qui sait la chair faillible, et n’est fort que par toi,
Et sent germer en lui, comme une fleur bénie.
Au soleil de l’amour l’espérance infinie !
Mais plus heureux, Seigneur, qui n’a jamais douté
Qu’en créant l’univers, tu l’avais racheté !

Ô Christ ! quand tu seras remonté dans ta gloire.
De l’homme aveugle encor conserve la mémoire !
Jésus ! prends en pitié, toi qui connus les pleurs,
Ses désirs insensés, non moins que ses douleurs ;
Ô Rédempteur promis à la faute première,
Toi, la toute-justice et la toute-lumière,
N’abandonne point l’homme à l’Esprit tentateur !
Toi qui fus délaissé, divin Consolateur,
Pardonne ! Et soulevant le fardeau qui nous blesse,
Mesure toute chute à la toute-faiblesse !

Et les Anges, penchés à la cime des cieux,
Immobiles, versaient des pleurs silencieux :
La Volonté divine avait ployé leurs ailes
Qui voilaient leurs fronts purs et palpitaient entre elles.
Oh ! si Dieu l’eût voulu ! Que d’un ardent essor
ils eussent dans les airs tracé leur sillon d’or,
Et du vent enflammé de ces ailes rapides
Balayé d’un seul coup ces bourreaux déicides !