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Page:Leconte de Lisle - Derniers Poèmes, 1895.djvu/220

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Et là, jamais nul mort, chair promise au réveil,
N’avait encor dormi l’immobile sommeil.
C’est vers ce blanc sépulcre, aride et solitaire,
Qu’ils portaient ta dépouille, ô Sauveur de la terre !
Soutenus par l’amour, l’espérance et la foi,
Mais les yeux lourds de pleurs, et plus pâles que toi !
Et ta mère suivait, et les femmes fidèles ;
Et le disciple aimé qui marchait auprès d’elles.
Celui qui, dans la Cène, un moment endormi,
Se pencha sur le sein de l’immortel Ami,
Sombre, laissant flotter sa blonde chevelure,
S’illuminait déjà de ta flamme future,
O Pathmos ! ô rocher prophétique, où ses yeux
Verront le Christ assis dans la gloire des cieux !
Et c’est ainsi qu’au sein de la crypte profonde
Ils allaient enfermer la lumière du monde !

Le sépulcre a reçu le Sauveur trépassé.
Les pieds à l’Orient, il repose, glacé,
Immobile, muet et rigide, et semblable
À toute créature humaine et périssable.
Et ceux qui le pleuraient, l’ayant enseveli,
Le cœur de sa divine image encor empli,
Parlant bas dans la nuit d’un nuage voilée,
Fermèrent le tombeau d’une pierre scellée ;
Puis, vers Jérusalem, éplorés, chancelants,
— Ils descendirent tous la montagne à pas lents.

Allez, derniers amis du Dieu mort pour nos crimes,
Vous qui, durant ses jours rapides et sublimes,