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Page:Leconte de Lisle - Derniers Poèmes, 1895.djvu/69

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Haleter au soleil le stupide univers !
Quel rêve ! Ô merveilleux enchaînement des choses,
Qui dans l’âcre parfum des femmes et des roses,
Et du sang, sous l’éclat des torches allumant
Mes tentures de pourpre et d’or, au grondement
De la foudre impuissante, au chant des voix serviles,
Dans la prostration des multitudes viles,
Nuits et jours, ramenant les grands songes anciens,
Me rendais la splendeur des temps Césariens !
Et toi, vivante fleur de la chaude Italie,
Éclatante du sang qui nous brûle et nous lie,
En un moment d’ivresse éclose au clair matin
Pour parfumer ma couche et le beau ciel Latin !
Ô toi qui me versais du regard et des lèvres
Le flot des voluptés et des divines fièvres,
Pour qui mon fils César, le pâle Cardinal,
Occit le Gandia la nuit du Carnaval,
Afin que, consumé du désir qui l’enivre,
Il mourût des baisers dont il eût voulu vivre,
Ma fille, que mon sein plein de flamme couvait !…


LE DIABLE.

Mon féal ! Vous feriez rougir, s’il se pouvait,
De vos débordements, Madame Marozie.
Sa mère vénérable en est toute saisie ;
Balthazar en devient très rose, plus vermeil
Que l’aube ou qu’une vierge au sortir du sommeil ;
Et Madame Lucrèce, en personne bien née,
Entre nous, Très Saint-Père, en est un peu gênée.