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Page:Leconte de Lisle - Premières Poésies et Lettres intimes, 1902.djvu/98

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et lettres intimes

jure politique s’unit impunément à la dépravation morale grossièrement dissimulée sous un voile de pruderie misérable et d’affectation religieuse ; de ce siècle enfin qui ne reconnaît que l’or pour dieu, et qui foule aux pieds tout adorateur du vrai et du beau, ne pliant pas le genou devant l’infâme idole et ne sacrifiant pas à la vénalité la pureté intérieure de l’âme. Honte à lui !

Notre terre, a dit l’énergique Barbier :

..... Ce n’est plus qu’un sale et mauvais lieu,
Un tripot dégoûtant, où l’or a tué Dieu.

N’a-t-il pas raison ?

Au reste, mon Ami, à quoi peuvent servir des protestations imprimées dont le noble et éclairé public fait des cornets de sucre ou de tabac ? Oh ! s’il existait encore, ce temps où le poète, homme privilégié, ne vivait que dans l’art et pour l’art, ce temps où les chants de l’enthousiasme immatériel ne se salissaient pas, comme aujourd’hui, au contact des ignobles bavardages de nos Chambres, au désir sans