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Page:Lemonnier - Noëls flamands, 1887.djvu/196

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V


La neige de Sainte-Catherine danse devant eux, blutée par les tamis de l’air, et des étoiles diamantent les cheveux qui sortent du coqueluchon de Monique. Quand ils pénètrent dans la grande chambre, la chaleur fond les flocons, et une rosée emperle ses frisettes blondes qui flottent en se dénouant.

— Bonne fête de Sainte-Catherine, dit la meunière à ses voisins en entrant.

Elle est en bonnet noir et en robe noire, correctement vêtue.

— Et à vous aussi, on vous la souhaite, Gertrude ! lui dit la femme de Damien Taubert.

— Il n’y a plus de fête pour nous, répond la meunière avec un triste sourire.

Mais en ce moment Martine crie : Gare ! et apporte au bout de ses deux bras tendus, sur le paillasson, la flammiche fumante.

Tout le monde aspire la bonne odeur qui sort de la croûte dorée et plus d’un ravale avec bruit sa salive, à cause de l’eau qui lui vient à la bouche.

Non, jamais flammiche ne fut plus vermeille sur les bords, plus fondante dans le milieu : la croûte s’enfle légèrement, et à travers des vésicules qui crèvent ça et là, on distingue une crème de beurre et de fromage fondus.

Le couteau plonge dans les flancs de la belle tarte et la découpe en tranches égales, de manière que chacun soit content. Puis, les lèvres se retroussent et les dents mordent avec plaisir dans la pâte chaude.