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Page:Lemonnier - Noëls flamands, 1887.djvu/242

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les repliant en quatre, mais tout le monde en mangeait de bon appétit. Un voisin, le gros Dirck, paria qu’il en avalerait deux en une seule bouchée, et en effet il les avala : ses énormes joues enfournèrent les deux crêpes comme une mie de pain, et on le vit seulement faire un peu la grimace quand il s’agit de les faire passer à travers le gosier. Mais la minute d’après, il se mit à rire dans sa graisse, et passa sa main sur son estomac en disant :

— C’est bon.

Pais le gros Dirck, levant son coude, laissa couler dans sa bouche coup sur coup deux demi-litres de belle bière, et la bière faisait glouglou comme l’eau d’une gouttière, en passant dans le vaste entonnoir de sa gorge. C’est ainsi que le voisin gagna son pari. — Noël ! Et tout le monde but à la santé du gros Dirck. Chacun d’ailleurs but à la santé de ses parents, de ses amis, de ses connaissances et même de ceux qui n’étaient ni des connaissances ni des amis ni des parents.

Vers neuf heures, les hommes s’en allèrent au cabaret vider un dernier verre et les femmes rentrèrent à la maison chauffer dans le lit la place de leurs hommes. Et quand il n’y eut plus chez les Snip que Nikker et sa nièce Truitje, la vieille Anna posa un petit verre devant Claes et lui versa du genièvre ; et elle fit la même chose pour son mari. Puis elle s’assit près du poêle et elle dit :

— Lukas, j’ai parlé à Claes Nikker du désir de notre garçon. Je vais vous dire à présent ce qu’il m’a répondu. Il donnera sa boutique, ses outils, ses formes et ses pratiques au mari de Truitje, mais il veut que nous donnions à notre garçon une vache, le pré qui est derrière l’école, trois paires de draps de lit, trois couvertures en laine et le lit.