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Page:Leo - L Ideal au village.pdf/23

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l’on voulait, en ayant soin de ne pas le commander chaud. Donc, faites vos malles ; nous préparons vos chambres. Présente nos compliments et nos amitiés à ta sœur.

« Ton vieil ami, Félicien Darbault. »

« Quel excellent homme ! s’écria Lucien. Ne m’écrit-il pas comme ferait un frère de mon père ? Ils n’étaient cependant que cousins issus de germains. Tu vois que la parenté n’est pas grande. Mais ceci n’est rien et le cœur est tout. Eh bien, faisons nos malles et donnons congé de l’appartement.

— Tu es donc bien décidé à te fixer là-bas ? demanda Cécile, qui craignait un retour de l’imagination ardente et mobile de Lucien.

— Parfaitement, et je ne comprendrais pas que nous pussions hésiter. En deux ans et quelques mois, ici, tout en menant la vie la plus stupide et la plus gênée, n’avons-nous pas dévoré le quart de notre patrimoine ? De ce pas où allons-nous ? C’est facile à voir. Là-bas, au contraire, je me le rappelle, tout est pour rien. C’est une abondance de tout : volaille, gibier, laitage, que sais-je ? Les fruits, ça ne se vend pas, on les ramasse. Nous ne dépenserons presque rien. Moi, d’abord, j’achète un coutil : ça me fait l’année ; de gros souliers, un chapeau de paille… Avec cette petite robe de barége, tu éblouiras les gens. — Et puis, ce que j’adore, vois-tu, moi, c’est la simplicité. Là-bas, on est comme on est, et nul n’y trouve à redire. Les paysans qui passent vous ôtent leur chapeau. On est seigneur de village… À peu de frais nous serons trouvés