Aller au contenu

Page:Leo - L Ideal au village.pdf/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

magnifiques. Enfin, nous serons libres ; nous ferons à notre guise et selon nos moyens, tandis qu’ici, pour quelques visites que tu reçois, il nous faut une maison tenue sur un certain pied, mensonge misérable, vanité fausse et stupide, à laquelle on sacrifie toute raison, toute sécurité. »

Cécile ne voulut pas interrompre son frère pour observer que lui seul l’avait empêchée de réformer leurs dépenses, et Lucien continua sur ce ton pendant une heure. Il pressentait que la nature champêtre allait lui fournir des inspirations sublimes ; un jour, Paris reverrait ses tableaux, et peut-être alors… Il l’accablait pourtant, ce Paris, de ses anathèmes ; Paris, c’était la mort, l’écrasement du génie. Il étouffait désormais dans ces murs maudits, et Cécile eut beaucoup de peine à lui faire comprendre que leurs préparatifs de départ exigeaient au moins quinze jours.

Dans cette attente, que Lucien remplissait des plus beaux rêves, toute sa gaieté revint, ses yeux reprirent leur éclat, et Cécile, heureuse, l’embrassait en lui disant « Te revoilà, le bon garçon d’autrefois est retrouvé. Tu redeviens beau. »

« À quoi penses-tu ? » lui demanda-t-elle un jour qu’elle le voyait tout rêveur, penché, un demi-sourire aux lèvres.

Il sourit d’un air mystérieux qui excita la curiosité de la jeune fille.

« Oh ! dit-elle en éveillant d’un sourire ses jolis traits, si c’est secret, je veux le savoir. »

Et, quittant sa place, elle alla s’asseoir sur les genoux de son frère, et, le fixant dans les yeux :