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Page:Leo - L Ideal au village.pdf/264

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« Monsieur Louis ! se répétait-il tout bas ; Monsieur Louis !… »

Le son de sa douce voix semblait être resté là dans l’air, près de lui. Elle avait répondu de sa parole. Elle estimait son ami. Elle comprenait bien, elle, qu’il ne pouvait aimer Rose. Eh bien ! il avait son estime et son amitié ! Que pouvait-il désirer de plus ? Rien. Rien que de la voir sans cesse, toujours, et malheureusement c’était impossible ; mais il la verrait souvent, et, comme en ce moment, dans l’absence, il la garderait en lui.

La moitié de la nuit s’était écoulée quand Louis de Pontvigail se décida à quitter ce lieu. Il ne craignait plus la rosée des nuits. Il ne songeait plus aux rhumatismes ni aux névralgies. Qu’était devenu le malade imaginaire d’autrefois ? Le sang maintenant coulait à flots dans ses veines. Il se sentait redevenu jeune, fort, hardi, et parfois dans ses courses, comme pour détendre ses muscles fatigués d’une si longue torpeur, il éprouvait le besoin de sauter des fossés, de franchir des haies, de courber de fortes branches dans les bois. Enfin, et pour obliger seulement le frère de Cécile, il venait de prendre l’engagement de braver cette tyrannie sous laquelle depuis trente-cinq ans il vivait courbé !

Confiant en la promesse de Louis de Pontvigail, Lucien se hâta de se rendre le lendemain chez Mme Delfons, où il devait trouver Rose. Il était heureux d’avoir à rassurer cette chère fille sur les persécutions qu’elle redoutait. Il la trouvait bien à ce sujet trop timide, trop dépourvue de résolution, et en souffrait dans son cœur ; mais quel homme re-