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Page:Leo - L Ideal au village.pdf/335

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Elle répondit par un cri terrible.

À cent pas de distance environ, devant eux, une flamme venait de briller entre les hêtres, et une explosion retentit. Ils coururent. Argus, qui les précédait, s’abattit en hurlant sur le corps de son maître. Près de l’arme déchargée, Louis était étendu, les yeux fermés, immobile, et de sa gorge un flot de sang coulait sur la terre glacée. Cécile, d’une main défaillante, toucha le cœur.

« Va chercher du secours ! » dit-elle à son frère.

Il partit en courant. La jeune fille banda de son mouchoir la blessure et, posant ses lèvres sur le front du moribond :

« Ô Louis ! dit-elle, vous ne saviez donc pas que je voulais vivre avec vous ? À présent, nous mourrons ensemble. »

Il rouvrit les yeux à cette parole, et les attacha sur elle un moment, avec une expression de reconnaissance et de joie suprême ; puis il les referma, et Cécile s’évanouit.

Tandis que des émissaires envoyés de tous côtés cherchaient le docteur Delfons, Lucien se procurait à la gare un brancard et des couvertures. Avec des précautions extrêmes, on plaça dans cette sorte de lit le moribond et on le transporta aux Saulées, dont on était proche. Louis vivait encore. Le docteur, accouru, après avoir sondé la blessure, donna quelque espoir de guérison.

Au grand scandale de tout Loubans, Mlle Marlotte s’établit aux Saulées, près du cher malade, qu’elle ne voulait plus quitter. Lucien, moins résolu qu’elle, mais aussi dévoué, n’abandonna pas sa sœur.